Le Nouvel An est l’occasion pour une famille de réfugiés de refaire sa vie

Both and family stand with some members of The Salvation Army's sponsorship team
by Salvation Army
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En 2018, Both et sa jeune famille ont vécu dans un camp de réfugiés en Éthiopie, dans des conditions qui se détérioraient rapidement. Ils étaient convaincus qu’ils ne vivraient pas un an de plus. Cette année, grâce à l’Armée du Salut à Ottawa (qui contribue aux efforts du gouvernement fédéral en matière de réinstallation des réfugiés), les prières de Both pour un avenir meilleur sont maintenant exaucées, mais son passé n’est pas si facile à oublier.
Voyager dans la peur
En décembre 2013, Both a quitté le Soudan du Sud, pays affligé par la guerre et la peur générale. Il vivait à Juba, la capitale. Il s’est enfui afin d’échapper aux militaires qui se sont mis à tirer sur les membres de sa tribu pour les éliminer. Lorsqu’on lui a demandé s’il était Nuer (c’était le cas), l’un des deux plus importants groupes ethniques du Soudan du Sud, Both a répondu en langue Dinka, ce qui lui a évité d’être tué. Il a également été pris pour cible pour avoir déclaré aux médias que des gens étaient tués.
« Dans mon pays, j’étais un militant des droits de la personne et un journaliste, révèle Both. Le gouvernement n’était pas content que je tienne des gens responsables de la guerre et que je dénonce la corruption. On voulait me tuer pour qu’on n’entende plus jamais parler de moi. »
Both s’est d’abord réfugié en Ouganda, puis au Kenya où il a rencontré Tina et où Gakah, leur fils, est né. Mais au Kenya, ils craignaient pour leur vie et ne pouvaient pas vivre dans un camp de réfugiés parce qu’ils y étaient trop vulnérables.
« Le Kenya était dangereux, raconte Both. Les autorités locales n’arrivaient pas à gérer le nombre de réfugiés qui entraient dans le pays, et des agents du gouvernement du Soudan du Sud étaient partout au Kenya à la recherche de leurs détracteurs. Nous avons été menacés d’être renvoyés dans notre pays d’origine, ce qui nous aurait valu une mort certaine. Or, l’Éthiopie comptait des millions de réfugiés et ne les renvoyait pas. C’est là que nous sommes allés. Nous n’avions pas d’autre choix.
« Il y avait moi, ma femme, mon fils et ma fille dans un camp de 15 000 personnes. Nous avons souffert tous les jours. La quantité de nourriture que nous recevions chaque mois n’était suffisante que pour deux semaines, c’est pourquoi ma femme et moi ne mangions qu’une fois par jour pour garder nos enfants en vie. Les femmes et les enfants pleuraient jour et nuit. C’était terrible. Chaque soir, je me cachais le visage avec ma couverture pour que mes enfants ne me voient pas sangloter. Dans ma culture, les hommes ne pleurent pas, mais j’ai fini par m’endormir à force de pleurer, car j’étais convaincu que nous allions tous mourir et que j’avais entraîné ma propre famille dans cette situation. »
Une nuit de décembre 2017, Both a été attaqué dans sa hutte et battu jusqu’à ce qu’il perde conscience.
« Le gouvernement du Soudan du Sud a découvert où je me trouvais. Tous ceux qui écrivent des articles contre ce gouvernement risquent leur vie et celle de leur entourage. Les autorités n’exercent aucune discrimination à ce sujet. »
Réinstallation
Une nuit, en septembre 2018, un travailleur de l’ONU est venu dire à Both et à sa famille qu’ils quitteraient le camp dès le matin. Ils n’avaient aucune idée de ce qui les attendait.
« Nous n’avions pas de bagages : uniquement les vêtements que nous portions tous les jours, précise Both. On nous a conduits du camp jusqu’à un avion. C’est à ce moment que j’ai su que nous allions au Canada. »
L’ONU a estimé que sa famille et lui étaient des réfugiés vulnérables ayant survécu à la violence et à de mauvais traitements, et qu’ils avaient immédiatement besoin de protection et de soins médicaux. Après quatre jours de voyage, ils sont arrivés à Ottawa.

« Quand nous sommes descendus de l’escalier mécanique de l’aéroport, j’ai vu des gens de l’Armée du Salut avec des pancartes sur lesquelles étaient inscrits nos noms. Je me suis rendu compte qu’ils venaient nous chercher. J’ai pleuré et pleuré.
« L’Armée du Salut nous a tellement aidés en nous offrant de la nourriture, des vêtements et un endroit où vivre, mentionne Both. Son personnel nous a expliqué la culture canadienne, et montré comment faire l’épicerie, cuisiner, utiliser le réseau de transport en commun et bien d’autres choses encore. Je veux qu’on sache que nous sommes de bonnes personnes. Sans l’Armée du Salut, je ne sais pas où je serais. Maintenant, je veux simplement vivre en sécurité, dans la dignité, et connaître le rêve canadien.
« Notre venue au Canada a été la plus belle chose qui nous soit arrivée. L’équipe de l’Armée du Salut, c’était les anges dont je demandais l’intervention lorsque je priais la nuit. C’est un groupe de personnes, que je considère maintenant comme des membres de ma famille, qui travaillent ensemble pour venir en aide aux personnes les plus désespérées. Leur bienveillance et leur amour : je n’ai jamais rien vu de tel. »
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