La face cachée des services d’urgence
De nombreux Canadiens connaissent l’Armée du Salut, mais très peu d’entre eux sont au courant de tous les services offerts par cette organisation, comme les services d’urgence et d’aide aux sinistrés (SUAS). Un grand nombre de premiers intervenants apprécient les cantines mobiles de l’Armée du Salut qui offrent, sur les lieux des sinistres, alimentation et hydratation. D’autres, par contre, ne connaissent que l’autre facette des services d’urgence, car ils ont déjà entendu quelqu’un demander : « Est-ce que le service d’aide aux victimes sera nécessaire? » Ils ne savent pas cependant en quoi consiste ce service. Lorsque les médias couvrent une catastrophe on peut voir sur les lieux, des camions de pompier, des ambulances et des voitures de police, mais aussi des véhicules des SUAS qui, selon les besoins, s’attaquent à la face cachée de la tragédie.
Craig Dunbar, coordonnateur de programmes depuis 5 ans, connaît bien les deux côtés de la médaille, car il a été pompier à la caserne 64 du Service des incendies d’Ottawa. Craig a toujours eu un intérêt marqué pour les services de soutien offerts aux victimes d’incendie. Quand, pour des raisons de santé, il a dû accrocher « ses bottes », il a fait des recherches et trouvé un programme de l’Armée du Salut qui lui permettait de soutenir les résidents de la collectivité qui vivaient des moments difficiles.
Melissa Donaldson, étudiante à l’Université d’Ottawa, a décidé de devenir bénévole auprès des SUAS quand elle a entendu Megan Berardelli, participante au Camp FFIT[1], parler du programme. Caressant le rêve de devenir pompière, Melissa croyait que cette expérience l’aiderait dans son cheminement de carrière. Elle a gravi les échelons à un train d’enfer passant de bénévole débutante à bénévole expérimentée, puis à chef de l’équipe Delta. Melissa a rapidement pris conscience de la valeur du programme offert par les SUAS, et en a appris beaucoup sur le « côté humain » des services d’urgence.
À Ottawa, l’équipe de la cantine mobile est composée de pompiers retraités de la Retired Ottawa Fire Fighters Association (ROFFA) et de bénévoles des SUAS qui servent des repas, des collations ainsi que des boissons chaudes et froides sur les lieux des sinistres, dans une unité mobile entièrement équipée. Plusieurs membres de l’équipe sont également spécialistes en trouble de stress post-traumatique. Cette équipe est présente lors d’incendies, mais aussi de catastrophes, pour veiller au bien-être des premiers intervenants qui sont présents sur les lieux d’un drame pendant de longues heures. Les SUAS ont offert leur aide lors de la fusillade au Monument commémoratif de Guerre et sur la Colline du Parlement en octobre 2014.
L’équipe des Services d’urgence et d’aide aux sinistrés de l’Armée du Salut offre du soutien psychologique et de l’aide tangible aux victimes pendant et après un sinistre. La ville d’Ottawa a donné une ambulance aux SUAS qui l’ont réaménagée. Ce véhicule sert à transporter des vêtements, des couvertures, des collations, des boissons, des chaussettes, des chapeaux, des gants, des moufles, des couches, des nécessaires d’hygiène et des combinaisons-pyjamas. En fonction des besoins des sinistrés, les SUAS leur remettent des cartes-cadeaux Loblaws ainsi que des bons d’achat pour des vêtements, des meubles et des lits. Les bénévoles des SUAS accompagnent aussi les clients dans leurs démarches auprès des assureurs, les aident à trouver des ressources financières et de l’hébergement d’urgence, les soutiennent psychologiquement, et leur proposent du counselling familial et divers services. L’équipe des SUAS est présente lors des incendies ou encore apporte son soutien au Service de police d’Ottawa lorsqu’il y a un appel qui nécessite la présence de l’Unité d’aide aux victimes. Elle fournit aussi de l’aide aux victimes de catastrophe comme en 2014, lors des inondations qui ont eu lieu dans la région de Kashechewan.
Lorsque nous avons demandé à Craig de nous expliquer la différence entre le rôle d’un pompier et celui d’un membre de l’équipe des SUAS dans une situation de crise, celui-ci a mentionné d’abord les similitudes entre les deux fonctions. « Les objectifs de ces organisations sont semblables, c’est-à-dire aider des gens à passer à travers l’une des pires journées de leur vie. La différence, c’est que les équipes d’intervention d’urgence doivent minimiser les pertes et les dommages et protéger et sauver des vies, tandis que celles des SUAS offrent du soutien concret qui permet aux sinistrés d’entamer le processus de rétablissement. De plus, les deux organisations travaillent ensemble afin de récupérer et de remettre aux sinistrés les biens – objets de valeur, médicaments ou documents importants – qu’ils ont laissés derrière eux. Les services d’urgence gèrent le lieu de l’incident alors que les SUAS gèrent les clients. » En tant que bénévole des SUAS, Melissa, qui est également inscrite sur la liste d’embauche du Service des incendies d’Ottawa, sait qu’elle acquiert des aptitudes qui l’aideront dans sa carrière de pompier. Elle a acquis une grande expérience et une connaissance pratique de la gestion des scènes d’urgence. Mais, ce qui est le plus important, c’est qu’elle comprend dorénavant les besoins des sinistrés.
Le travail est difficile et les heures sont parfois longues et imprévisibles, mais les résultats sont très gratifiants. Craig cite en exemple un incendie qui a eu lieu en avril 2015, avenue Deerfield, comme témoignage de la pertinence du programme. Un incendie qui se propageait rapidement a détruit un complexe de 30 unités et jeté plus de 70 personnes sur le pavé. En quelques heures, les responsables des SUAS et de la Croix-Rouge, ainsi que le propriétaire de l’immeuble, Minto Homes, ont réussi à reloger presque tous les sinistrés dans des hôtels en attendant de trouver une solution permanente. Sur le plan personnel, Craig se souvient d’un incendie qui a laissé dans la rue une petite famille de quatre, soit une mère avec sa fille et ses deux garçons. Réfugiés chez des voisins, ils étaient désemparés et ne savaient pas quoi faire. Pendant que des membres de l’équipe s’occupaient de la famille, Craig est allé récupérer dans le camion, un bac contenant des chaussettes, des chapeaux, des gants et des moufles à l’intention des enfants qui étaient pieds nus et en pyjama. La jeune fille était très émotive et se disputait avec sa mère jusqu’au moment où elle a vu une paire de chaussettes colorées et pelucheuses. Le fait de savoir qu’elle pouvait choisir tout ce qu’elle voulait dans la boîte l’a rassurée. Craig raconte : « Son visage s’est illuminé. Elle a enfilé les chaussettes et s’est mise à danser en les montrant aux membres de sa famille et aux voisins. La voir si heureuse m’a profondément touché. »
De son côté, Melissa trouve cette expérience enrichissante, car elle peut sentir le soulagement des clients lorsque l’équipe des SUAS arrive sur les lieux. « Nous aidons des personnes de tous âges et de toutes cultures, peu importe la situation. C’est merveilleux de quitter les lieux en sachant que nous avons prêté secours à une personne qui vit l’une des pires journées de sa vie. » Melissa précise que s’occuper des clients est sans contredit l’aspect le plus gratifiant de son travail, mais que servir un café ou un hamburger à un pompier exténué n’est pas très loin derrière. « Je suis fière de faire partie de l’équipe des SUAS et de changer les choses au sein de ma collectivité. Cela justifie que je doive parfois me lever la nuit, par un temps glacial. »
Les Services d’urgence et d’aide aux sinistrés d’Ottawa sont toujours à la recherche de bénévoles compétents. Vous pouvez communiquer avec Craig Dunbar pour obtenir de plus amples renseignements : craig_dunbar@ottawaboothcentre.org
Les Services d’urgence et d’aide aux sinistrés de Toronto recrutent activement des bénévoles pour leur équipe. Vous pouvez communiquer avec Mark Evans pour obtenir de plus amples renseignements : mark_evans@can.salvationarmy.org
Article écrit par Sue Jones – Sue, qui a été pompière pendant huit ans, est maintenant agente de prévention des incendies pour le Service des incendies d’Ottawa. Elle est cofondatrice de Fire Service Women Ontario, et a siégé au conseil de cette organisation au cours des sept premières années. Elle est également directrice du Camp FFIT d’Ottawa.
Craig Dunbar a travaillé au Service des incendies d’Ottawa pendant 21 ans. Il est maintenant coordonnateur de programme pour les Services d’urgence et d’aide aux sinistrés de l’Armée du Salut.
Melissa Donaldson commence sa quatrième année à l’Université d’Ottawa où elle termine un baccalauréat avec double majeure en histoire et en psychologie. Elle est chef de groupe pour les Services d’urgence et d’aide à la famille de l’Armée du Salut.
Article paru dans la publication Fire Service Women Ontario, été 2016.
Photo : Sue Jones
[1] Camp destiné aux jeunes femmes pompières d’Ottawa